Le bouquet final

Je ne saurai jamais le détail, ce qu'il a vraiment fait avec mon corps quand j'avais 6 ans. Mais ce n'est pas important. Je ne préfère pas savoir, que ça reste en lui seul et qu'il meure avec. Il a appelé ma soeur pour lui dire que je l'accusais de m'avoir battue et que même j'avais eu des echymoses. J'ai imaginé le regard rond de ma soeur devant le mensonge, un truc qui n'a absolument rien à voir avec ce que je lui ai dit. Surtout que j'étais censée avoir 20 ans et j'étais plutôt athlétique à 20 ans et lui plutôt mou et visqueux... sans vouloir me la raconter...

Ca a tremblé à l'intérieur de moi, comme j'imagine un volcan pourrait faire trembler la terre avant de jaillir en geyser flamboyant de lave. J'ai imaginé la scène, j'ai imaginé les yeux ronds comme des soucoupes de ma soeur. J'ai éclaté de rire, un rire cristallin, un fou rire qui a rempli tout l'espace du manoir. Un rire devant l'incongru, un rire de victoire aussi pour avoir levé le menteur dans toute sa splendeur, un rire de joie qui nettoie tous les infimes doutes qui auraient peut-être pu nous revenir quant à l'exactitude des souvenirs qu'il prenait un malin plaisir à transformer, un rire de vérité avérée, un rire de bonheur d'avoir réussi à transcender tout ça grâce à un parfait travail d'équipe de toute la famille. Un rire lumineux dans le soleil, un gros plein d'énergie.

Après demain, le 26 mars, ça fera 3 ans que le sac à souci est parti. C'était le temps de guérison totale des soucis que je m'étais fixé. Alors jour pour jour, demain j'aurais les dernière nouvelles de ce gros souci qui enterre sa soeur devant tout le reste de la famille aujourd'hui au courant de sa pédophilie. Enterrement symbolique d'un souci dont je ne me doutais même pas de l'existence 3 ans plus tôt. Et le 26 sera le vrai premier jour de ma vie sans souci.